
Rencontre 19
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Rencontre 30 24.06.2025
C’est par une belle journée de mai, après une balade dans Lyon, sous un chaud soleil, mon mari me propose de s’installer à l’ombre, à la terrasse d’un café. Nous sommes heureux de nous rafraîchir, alors que mon regard se fige sur une file de gens qui font la queue, en attendant que le cinéma d’à côté ouvre ses portes.
Une petite dame, d’une soixantaine d’années, bien chapeautée, son sac bloqué sur sa poitrine, est bloquée devant la porte comme si elle avait peur qu’on lui passe devant, puis un couple d’ados derrière elle, semble oublier le monde autour d’eux, ils s’enlacent, s’embrassent et attendent le moment où ils pourront être dans le noir pour se retrouver seuls au monde.
Ensuite deux couples suivent, mis sur leur trente-et-un, qui font la sortie exceptionnelle à la ville et sont heureux d’être ensemble. Les deux dames sont joyeuses et agitées et rient à gorge déployée pendant que leurs compagnons ont une discussion très sérieuse.
Un enfant en salopette, sa casquette enfoncée sur les yeux, tourne autour de la file d’attente et s’impatiente. Sa maman l’appelle, lui crie après, mais le gosse s’agite et bouscule les uns après les autres, même un pépé âgé, avec sa canne, en chemisette et chapeau mou, qui n’apprécie pas cette longue attente, la chaleur et bougonne après le petit garçon.
Deux jeunes filles, cheveux longs, décolletés provocants, mini jupes et talons aiguille remontent la file comme pour s’immiscer avant leur tour, la mère de famille les interpelle disant qu’elles veuillent bien faire comme tout le monde et prendre leur place, à l’arrière, comme les autres. Le pépé intervient aussi et donne raison à la jeune maman, disant qu’aujourd’hui il n’y a plus de respect et la jeunesse se moque bien des personnes âgées.
Le dernier à attendre, un jeune adolescent vêtu d’un jean déchiré, un marcel très coloré, un casque à écouteurs sur la tête, un paquet de chips à la main, regarde le ciel, paraît découvrir le lieu et sans s’occuper du reste des gens, la tête battent la mesure, les yeux en l’air oubliant son environnement.
Soudain, une ouvreuse aux cheveux blonds frisés, le visage très maquillé, vient faire l’ouverture et vendre les billets d’entrée, c’est la bousculade ... mais bientôt tous seront assis, prêts à assister au spectacle dans une salle climatisée au grand bonheur de tous.
Nicole
Burger King Saint-Priest, mercredi 12h30
Seule à ma table, dans l’espace jeux, je dépareille un peu avec les jeunes mamans accompagnées de petites têtes, blondes, brunes ou rouquines. Je suis totalement cernée, nous sommes mercredi ! En temps normal, j’aurais choisi un autre jour, mais j’ai rendez-vous avec mon amie qui souhaite distraire son petit-fils de 4 ans. Mon rôle est de réserver une table bien située afin qu’elle puisse le surveiller aisément dans cet espace enfant. Je me suis commandé un muffin et un café insipide, afin de ne pas me faire remarquer en ne consommant pas sur place !
Du fond de l’espace enfant, j’ai tout loisir d’observer la clientèle qui se croise et s’entrechoque dans le restaurant déjà bondé.
De jeunes ouvriers, en tenue de travail à bandes réfléchissantes et grosses chaussures de sécurité, optent pour des menus XXL. Le bruit ne semble pas les déranger, il est vrai que comparé à celui des marteaux piqueurs qu’ils manient toute la journée, c’est plutôt calme. Ils iront dehors, le froid, ils y sont habitués et ils pourront griller une cigarette sans contrainte. Tout près d’eux se trouve une maman avec trois jeunes bambins hyper excités, tétines à la bouche ou doudous à la main. Elle essaie tant bien que mal de ranger bonnets et écharpes dans son large sac, alors que le papa, peu investi, a les yeux rivés sur son smartphone. Sous les directives de la maman, très habituée aux préférences des jeunes garçons, il passe, enfin, la commande. Ils n’ont néanmoins, perdu aucun enfant, et la maman s’assied, en soufflant, pas loin de moi, demandant au papa d’aller jouer avec ses fils. Il remonte son pantalon, trop lâche, qui laisse entrevoir son slip à large élastique noir! Sans grand enthousiasme il se dirige vers les jeux, le smartphone toujours à la main. Maintenant c’est au tour d’une mamie d’arriver face aux bornes de commande. Son petit-fils sait ce qu’il aimerait manger mais elle ignore comment fonctionne ce serveur robotisé. Elle ajuste ses grosses lunettes à double foyer et sert fort son sac sur sa poitrine. D’où je suis, je peux apercevoir son angoisse. Derrière elle, attendant son tour, une jeune fille lui propose son aide. Elle a le teint basané, un immense foulard recouvre ses cheveux et une partie de son visage avant de retomber sur son impeccable abaya blanche. Elle prend même le temps de lui expliquer la composition des burgers, mais la mamie ne perd pas de temps, salade pour elle et Box pour son petit-fils, coca bien sûr, pour se donner l’impression d’être encore jeune. Au moins dans sa tête. La jeune femme patiente et bienveillante lui conseille de régler avec sa carte bleue, sans contact, car plus rapide. Elle acquiesce, sûrement habituée à cet usage de paiement. Elles échangent quelques mots ‘merci beaucoup’ ‘avec plaisir’ et se séparent sur un sourire. Maintenant voici un homme vêtu d’un costume cravate impeccable avec un attaché case en bandoulière. Je suppose qu‘il n’a pas trouvé de restaurant gastronomique dans le coin, le lieu ne s’y prête guère. Finalement, vu sa rapidité à passer commande, je ne pense pas me tromper en l’imaginant en jean et baskets le week-end et adepte de ce type de restauration rapide .L’habit ne fait pas le moine, dit un célèbre proverbe ! C’est ensuite un défilé de consommateurs, de tous âges, de toutes nationalités, sereins ou agités, mais ayant tous le besoin de manger ou de s’hydrater, rapidement, par crainte de faire une malaise !
Maintenant j’aperçois la queue qui s’allonge aux abords des toilettes…..mais ce n’est qu‘une parenthèse à mon observation. Enfin, mon amie arrive, avec Augustin. Du haut de ses 4 ans, il décide ne pas vouloir faire la queue à la borne, il préfère aller jouer. Souhaitant éviter les cris du petit capricieux, elle me demande de bien vouloir le surveiller. J’accepte, mais il est très remuant et mes yeux sont sollicités de tous côtés. C’est avec soulagement que je vois mon amie arriver avec sa commande, mes yeux vont pouvoir se repositionner au centre de leur orbite. Nous essayons tant bien que mal de papoter, de crier dirions-nous. Pas facile avec un loulou qui prend plaisir à se cacher dans les jeux, afin de voir si sa mamie est plus préoccupée par lui que par mes propos ! Augustin, enfin las des jeux, nous quittons le restaurant. Je la suis jusque chez elle et là, enfin, le garçonnet endormi sur le canapé, nous discutons à voix basse devant une bonne tasse de thé. Pour moi, la galère n’est cependant pas terminée, car je vais devoir rejoindre Chassieu, en passant par les Sept-chemins, et les interminables travaux routiers. Peut-être que je vais croiser mes beaux ouvriers armés de leurs marteaux piqueurs !
Annie
Hier, j’ai accompagné ma compagne pour sa cure de thalasso à Hyères pour dix jours environ. Je redescendrai la rejoindre en fin de séjour pour profiter ensemble du bord de mer quelques jours, avant l’envahissement de la région début juillet par les touristes de juillet. N’étant pas un adepte des journées peignoir-babouches en éponge et salades de concombre-maïs, je rentre donc à Chassieu profiter du calme de notre jardin.
Je fais donc étape sur la route du retour, à l’aire d’autoroute de Montélimar. Je me suis arrêté à midi pour déjeuner d’une tranche de terrine de lapin, d’un steak frites et d’une tarte au citron meringué choisis au buffet du snack, personne n’étant avec moi pour faire discrètement le bilan calorique de mon plateau. Mon repas terminé, avant de reprendre la route, je sirote un double-expresso, garantie contre un assoupissement intempestif au volant. Ayant terminé la lecture de la Tribune de Montélimar, journal distribué gracieusement par une hôtesse tout aussi gracieuse à l’entrée de la cafétéria, je laisse mes yeux détailler les clients nombreux maintenant, à faire la queue devant les étals et banques réfrigérées du restaurant. Comme disait mon père, « le spectacle est dans la salle ! » Devant mes yeux défile pèle- mêle, un condensé de l’espèce humaine dans toute sa diversité.
Tout d’abord, une famille de cinq personnes ouvre la marche. Deux garçonnets de dix ans environ, probablement des jumeaux, se hissent péniblement sur la pointe des pieds en quête de deux œufs mayo en entrée, de deux hamburger-frites plats (vedette du menu enfants) et d’un ramequin de mousse au chocolat et d’une boisson au thé glacé. Soudain, l’un d’entre eux s’aperçoit qu’il a oublié de prendre les couverts. Il plante là son plateau, bloque l’avancement de toute la file et part réparer cet oubli sous la réprobation générale. Sa mère, une femme blonde, un peu forte, moulée dans une robe un peu échancrée à motifs tahitiens et chaussées de tongs décorées de grosses marguerites, âgée d’une petite quarantaine environ, affublée d’un accent belge remarquable lui intime l’ordre de se dépêcher et ordonne à son mari Robert et leur fille de doubler l’étourdi. Robert, en short et marcel neufs, siglés de la marque à la virgule et chaussé de baskets de la même marque U.S. qui ont plus connu les trottoirs de Bruges que les parquets des campus américains et coiffé d’un bob vert vantant « l’authentique bière de Bruges » déboite de la file, ventre et plateau en avant. Il délaisse les entrées pour commander pour lui et sa femme une andouillette à la ficelle sauce moutarde, des frites et deux coupes de crème de marron chantilly. L’Ardèche il est vrai est de l’autre côté du fleuve. La jeune fille de dix-sept ans environ, essaie de se faire discrète et cherche à faire oublier sa famille un peu voyante. Elle se contentera d’une salade tomate-maïs-œuf dur-roquette et d’une tranche d’ananas pour dessert, sa ligne étant primordiale pour la tenue qu’elle arbore fièrement ; un haut court laissant entrevoir son nombril agrémenté d’une pierre qui se voudrait précieuse et un shorty moulant. Elle est juchée sur des crocks roses fluo assorties à son haut flashy, et peu propices à une démarche légère et stylée. Toute la petite famille d’Outre-Quiévrain aborde maintenant la caisse ; les garçons après enregistrement de leur plateau se ruent à l’assaut de la salle à manger, en quête d’une table proche des jeux d’enfants, suivis de loin par leurs parents essoufflés et malhabiles à slalomer entre les différentes tables occupées.
Mes yeux abandonnent là, notre famille belge une fois installée pour reprendre le suivi de la file d’attente. J’avise deux jeunes hommes, la trentaine, style cadre dynamiques dans la banque ou l’assurance ; la mallette d’ordinateur à la main, ils détonnent en costume cravate stricts, cols fermés, parmi les touristes et familles majoritaires en ce début d’été. Chacun d’eux, l’oreille collée à son portable, absorbé par une conversation sûrement capitale pour la bonne marche de leurs affaires voire celles du monde entier. Ils feignent un peu hypocrites, ne pas se rendre compte qu’ils coupent la file et n’entendent pas les grognements de réprobation des gens ainsi court-circuités. Mais le personnel de service veille et l’ordre est vite rétabli. « Hum ! Hum ! S’il vous plaît Messieurs, une place pour chacun et chacun à sa place » conclut un vieil homme qui sort en guise de revanche une carte d’invalide lui permettant à lui, de se jouer des files en toute légalité.
Plus loin, mon regard accroche trois uniformes bleu-marine de la gendarmerie nationale fièrement portés par, deux capitaines accompagnés d’un maréchal des logis qui leur sert de chauffeur. Le képi sur la tête, rangés par ordre de taille et de grade, le maréchal des logis fermant la marche, ils attendent leur tour, discutant à voix basse, leur conversation étant rythmée par les seuls « oui mon capitaine », « bien mon capitaine » « c’est sûr mon capitaine » adressés à haute voix à ses supérieurs par le sous-officier plein de respect et de déférence. Leurs mimiques compassées sont bien décalées devant ce buffet et attirent quelques sourires entendus à certains témoins de la scène.
Derrière nos amis de la maréchaussée prennent place dans la file, une dame âgée, coquette malgré ses deux pieds dans le plâtre, discrètement assise au fond d’un fauteuil roulant et ses accompagnatrices. Elle est cornaquée par deux jeunes ambulancières aux petits soins pour elle, vêtues d’un pantalon et d’un blouson siglés France Assistance Lyon. La vielle dame loue la gentillesse de ses ambulancières et prend à témoin une jeune femme dans la file. Elle lui raconte avec force détails l’accident qui la prive de ses jambes. Comment a-t-elle pu ne pas voir que la piscine du village vacances où elle accompagnait ses petits-enfants était en cours de remplissage et donc presque vide ce matin-là ? Elle a sauté et s’est brisé les deux talons. Elle s’en veut tant d’avoir gâché leur fin de séjour. Les enfants sont restés seuls avec leur père, leur mère est rentrée en train pour la soigner chez eux et elle, elle fait le voyage en rapatriement sanitaire prise en charge par les bons samaritains de la compagnie d’assurance. Pendant qu’elle se lamente, plus sur les tracas qu’elle cause à famille que sur ses malheureux talons en capilotade, les ambulancières ont rempli son plateau et le leur, et partent en quête d’une table, pas trop près des jeux d’enfants, ni des sanitaires, ni des odeurs de cuisine, ni des machines à café, pas dans les courants d’air, pas face au soleil… selon le cahier des charges établi par la mamie en fauteuil. De quelle patience font preuve les jeunes femmes pour assurer le bien-être de leur blessée du jour.
Soudain, des cris aigus d’enfant couvrent le ronron des conversations et le bruit des couverts au fond des assiettes. Une petite fille de quatre ans environ se roule par terre devant la banque réfrigérée, rouge de colère, les yeux exorbités et lance force coups de pied et de poings rageurs à sa mère désemparée par cette soudaine crise. Sa mère lance des yeux gênés et effarés autour d’elle. Elle a refusé une deuxième boule glace au chocolat à sa petite fille mais va très probablement céder à ce caprice comme prix de la paix « sociale » et du retour du calme dans la famille et le restaurant. Elle fera peut-être preuve d’autorité plus tard à la maison. Mon café est terminé depuis longtemps. Je vais devoir abandonner mes observations et reprendre le chemin de Chassieu. J’étais seul au milieu de cette foule, de tous ces gens qui se sont croisés sous mes yeux, se sont côtoyés, ignorés, parlé, ont échangé un sourire, un geste de connivence ou de réconfort, dans ce vaste hall de restaurant où chacun ne fait que passer, au hasard de leurs itinéraires.
Je me suis levé de table et j’ai siffloté en rejoignant ma voiture « chacun sa route, chacun son chemin, chacun son rêve, chacun son destin ». J’ai repris la route, pas celle de Memphis …celle de Chassieu suffira pour aujourd’hui.
Didier
Il fait beau, j’ai envie d’un café. Je m’installe à une petite table isolée de la cohue. Je suis bien, le soleil me réchauffe, il m’a manquée. Il a enfin gagné la bataille sur la pluie. Dans quelques mois je regretterai peut-être celle-ci, mais pour l’instant la douce chaleur des rayons me conforte dans mon bien être.
Je regarde, amusée, le va et vient des passants.
Vers les charriots une course s’engage entre un homme et une femme. Celle-ci énergique et pressée, réussi à saisir le dernier charriot. Son attitude me déplaît, elle n’a aucun regard pour l’autre personne, comme si elle était seule. Tout en elle crie : « Moi d’abord ». C’est le genre de personne qu’il vaut mieux avoir avec soi que contre, pour éviter les ennuis. Elle part d’un pas décidé, en claquant des talons, heureuse de sa victoire.
Le monsieur, d’un air blasé, se dirige vers un autre dépôt de charriots. Tout en lui indique la résignation. Ce n’est certainement pas la première fois qu’on lui passe devant. D’un pas lourd, courbé sur son charriot, qui lui sert de déambulateur, il va vers la grande surface. Il a le dos rond, comme prêt à recevoir des coups. A quoi pense-t-il pour donner une telle impression ?
Il passe devant la femme super pressée qui est arrêtée devant une vitrine de vêtements. Maintenant elle a tout son temps pour détailler, d’un air pincé, une robe d’été.
Un jeune père arrive accompagné d’une fillette qui trottine à ses côtés : « Papa hop charriot, papa hop charriot ». Le père en souriant, attrape sa fille : « Hop, hop, dans le caddie mon gros paquet ». Elle rit aux éclats, toute heureuse d’avoir grandi d’un seul coup et de n’avoir plus à lever le nez pour voir autour d’elle. Ses yeux vifs mitraillent les alentours jusqu’au marchand de glaces.
Devinez la suite ?
Un couple de personnes âgées arrive tout doucement. Elle lui donne le bras, signe qu’il y a longtemps qu’ils cheminent ensemble. Il s’efface derrière elle pour entrer à la boulangerie et vont choisir des pâtisseries. Ils donnent l’impression d’être heureux et d’apprécier d’être encore ensemble à leur âge. La vendeuse leur sourit et leur désigne une table où ils s’installent avec plaisir en attendant leur collation. C’est certainement des habitués du quatre heures gourmand.
Une petite dame, toute pimpante dans son manteau gris, une jolie écharpe chamarrée autour des épaules, s’installe à une table. Elle me fait un petit signe et me demande en souriant si elle peut se mettre près de moi. J’apprends qu’elle n’ose pas s’arrêter seule à une terrasse, mais me voyant déguster mon café, cela lui a fait envie. Je réalise de suite qu’elle a envie de parler et elle me confie qu’elle se fait du souci pour son mari qui est hospitalisé. Je comprends sa peine l’ayant vécue. Puis après avoir déchargé son cœur, elle se sauve, c’est l’heure des visites.
Cette parenthèse me fait comprendre qu’il est parfois plus simple de confier sa peine à une inconnue que l’on ne reverra jamais, que de parler avec ceux qui nous entourent.
Une femme arrive, suivie de trois ados. Tous les quatre ont les yeux rivés sur leur portable. Chacun dans son monde. De temps en temps ils lèvent le nez pour voir s’ils sont encore ensemble, et dès que le groupe se reforme ils repartent, sans se parler.
Un SDF s’installe vers l’entrée principale, pose son cabas, qui renferme tous ses trésors, près de lui, et tend une main crasseuse vers les clients. Jusqu’à ce qu’un vigile, grand baraqué représentant de la loi, le fasse partir vers une autre boutique.
Au loin un couple arrive poussant un charriot, la femme fulmine : « Tu en as encore pris un qui roule mal », « Y’en avait pas d’autre »,
« T’avais qu’à aller en chercher un plus loin. Pousse-le ». Entre eux ce n’est pas le grand beau ! Ils se parlent, mais les mots les éloignent l’un de l’autre. Elle file devant, la liste des courses à la main, suivie du couinement du chariot. Est- ce la fin de leur histoire ou leur façon de vivre ?
Un homme s’approche, il est grand mais il marche la tête basse. J’ai envie de lui dire : « Redresse toi tu respireras mieux, bombe le torse, la vie est autour de toi, pas sous tes pieds ».
Au rayon extérieur de la boulangerie deux clients s’affrontent : « J’étais avant vous ». « Vous êtes parti vers les gâteaux, vous avez perdu votre tour ». Ils ont quel âge pour se chipoter comme des gosses ? la vendeuse essaie de les calmer et se dépêche de servir.
Cette discussion stérile et agressive m’ennuie. Maintenant ma table est à l’ombre, le jour s’en va. Le ballet des inconnus ne m’intéresse plus.
Je ramasse mes affaires et pars vers d’autres cieux.
Nicole
Koss Ile grecque Club Marbella, "Zorba Beach" du 24 juin au 01 juillet 2018. Nous allions passer un séjour extraordinaire en famille. Douze personnes d'une famille dont un bébé de 8 mois. Le Restaurant principal était à l'intérieur avec une partie en terrasse, couvert, buffet varié à volonté : cuisine internationale et locale, buffet à thème, show-cooking, snack. Juin 2018, se déroulait la coupe du monde, organisée par la Russie, et nous étions à Kos en plein dans la rencontre (France /Argentine ! Pour les huitièmes de finale). Mais cela nous ne le savions pas car la réservation avait été faite 6 mois auparavant. Et nous apprenions, également, (que le match n'était pas réceptif à "Zorba-beach") Quelle déception ! En ce jour particulier, du samedi 30 juin 2018, jour du fameux match. Comme chaque matin, levée avant les autres, j'étais venue prendre mon thé, en attendant mon petit monde, pour déjeuner ensemble sur la terrasse. Des vacanciers commençaient à s'installer, dans cette immense terrasse qui faisait le tour du Buffet intérieur. Dans la piscine, attenante à la terrasse, se déroulait une gymnastique aquatique, il faisait déjà 25 ° à 9 heures du matin. Anglais, latinos, faisaient partie de cette épopée, mais nous français étions en majorité. Deux couples d'anglais arrivaient toujours les premiers, le couple plus jeune avec deux enfants. Les deuxièmes un peu plus âgés, très excentriques. La Femme un chapeau nouveau tous les matins assorti à son tailleur, l'homme très British dans son costume, manquait seulement la canne! Deux verres de champagne, accompagnaient leur "Twining-English-Breakfast" et des petites pâtisseries. Je pense qu'ils devaient confondre les cocktails du soir avec le petit déjeuner...mais je ne les jamais vus au cocktail du soir. En maillot de bain !!! Je continuais de siroter mon thé aux fleurs de jasmin, en attendant l'arrivée de mes proches lorsque mon regard se tourna vers le couple de jeunes et leurs enfants, qui ne tenaient pas en place. J'étais impressionnée par la quantité de nourriture qu'ils pouvaient avaler de si bon matin ! Bacon, œufs, toast, tomates, champignons, boudin noir, porridge, marmelade, et bien sûr accompagné de leur traditionnel "Thé Lipton". J’étais frappée par leur gigantesque petit déjeuner. Comment pouvaient-ils ingurgiter tout cela ! Bien sûr, le buffet proposé à volonté était attrayant. Mais ce matin-là, ils étaient venus avec quelque chose en plus ... Sur leurs visages...les couleurs de l'Argentine ! Mais le match ne pouvait être retransmis! Bon au moins ils annonçaient leurs couleurs ! Mes pensées furent interrompues par une bande bruyante de jeunes «latinos» quatre filles et trois garçons, qui prenaient place, juste près de ma table, et bien sûr bariolés de peinture Argentine !! Décidément, nous, nous n'avions rien prévus, le mach n'étant pas retransmis ! Une partie des jeunes latinos était déjà revenue du buffet avec leurs assiettes pleines de churros, accompagnés de chocolat chaud épais, et bien sûr leurs traditionnels pains badigeonnés de tomates et d'huile d'olive ! Woaaaawwwww… autant j'adorais cela, ça me rappelait mon enfance, mais à neuf heures du mat' mon estomac ne l’accepterait pas. La deuxième partie des latinos revenait avec dans leurs plateaux des "tostadas" (pains grillés) accompagnés de confiture de lait tradition argentine et diverses petites pâtisseries. Un garçon du groupe avait une guitare, et se mit à gratter sur les cordes, un air de Django Reinhardt, créant une ambiance jazzy. Le couple des jeunes anglais se mit à taper des mains créant une belle ambiance matinale... Devant cette sympathique atmosphère bonne enfant. Je me hasardais à demander à une des jeunes latinos, aux longs cheveux noirs, de quelle origine ils étaient. Ne comprenant pas je lui reposais la question en Espagnol... étonnée, elle me demanda « Tu eres Espanola? » Je lui répondis en espagnol : « Non je suis française, mais d'origine espagnole à 100/100. Alors sans se démonter la jeune espagnolette avec un large sourire me lança! « Alors tu es pour l'Argentine ce soir ! » Pas eu le temps de lui répondre..! A ce moment-là, une bande de jeunes, entourant et suivant Be-ka, l'animateur du club en criant « Allez la France Allez la France !!! » Je demandais ce qui se passait Un jeune me répondit : « Be-ka il va installer un écran géant, à la salle de réception et faire la connexion avec la Russie, pour voir le match. Il a été à Kos prendre ce qu'il fallait pour l'installation. Woaaaawwwww génial ! « La nouvelle se répandit telle une traînée de poudre, les téléphones n'arrêtaient pas de sonner, rependant la nouvelle ! Mon petit monde arrivait, dans ce brouhaha, me demandant ce qui se passait !!! Ce fut une explosion de joie, en apprenant l’incroyable nouvelle! On allait pouvoir voir le match. Mais" Be-ka" calma un peu notre ardeur, il allait essayer de se connecter, pour qu'on puisse voir le match... ce n’était pas gagné encore !!! Beka était originaire de Dijon. Ses parents étaient arrivés la veille pour le week-end. Nous avions sympathisé, et Be-ka avait promis à son papa, qu'il ferait tout pour installer la connexion ! On ne traîna pas ce matin-là, au petit déjeuner ! Le match était programmé à seize heures. Il fallait se procurer les peintures festives ! La panoplie du supporter. On n’allait pas laisser les "Britishs "et les "latinos "seuls agiter leurs drapeaux. Pendant que "petit Tom "faisait trempette avec sa mamie, nous avions, les femmes, fait la liste des accessoires pour le match. Dans le club il y avait deux supérettes et des petites boutiques qui avaient fait le plein en prévision du match! Nous avions tout trouvé. Nous serons prêts ! Les latinos et les Britishs on arrive ! Nous avions avancé l'heure du repas de midi, qui en réalité nous déjeunions toujours vers quatorze heures. Nous devions être dans la grande salle de Réception à partir de quinze heures trente, et il nous fallait nous préparer. A quinze heures quarante-cinq, nous arrivons dans la salle, déjà à moitié pleine, ébahis devant le travail accompli par Be-ka et son équipe : grand écran panoramique, des guirlandes de drapeaux suspendues au plafond, une majorité de drapeaux Français, des bancs des chaises, fauteuils, etc... Be-ka était en train de régler la transmission. On commençait à voir les premières images du stade Russe et les supporters dans les gradins... Nous attendions avec émotion l'entrée des joueurs. Les pronostics allaient bon train. L'Argentine était donnée favorite. Mais, nous, on y croyait. Le match fut palpitant. Des applaudissements, des protestations, à la mi-temps 1/1 au score. A quelques minutes de la fin, nous étions à 3/3, je ne regardais plus l'écran... c'était trop crispant. Puis des cris des applaudissements ! Je rentrai. Les gens criaient «On a gagné !! On a gagné !!!» Je regardais l'écran France 4... Argentine 3. Ce fut un délire, une grande majorité d'hommes, de jeunes Be-ka en tête se jetèrent dans la piscine... C'était de la folie. Mais une grande surprise nous attendait encore dehors, entre la piscine et la salle de réception, se tenait le chapiteau des représentations où Be-ka tous les soirs nous offrait des spectacles différents avec sa troupe. Le personnel du club était en train de dresser des tables avec nappes blanches, couverts. Nous étions conviés à fêter la victoire de l'équipe de France. Puis il devait nous faire une annonce. Vingt heures la terrasse était bondée, il était affiché tenue de mise "blanc" comme Be-ka qui nous fit un petit discours, prolongeant la troisième mi-temps du match accompagné d'applaudissements...Et le spectacle commença. Ce soir-là l'équipe théâtrale dirigée par Be-ka se surpassa, ovationné par tous les vacanciers. A la fin du spectacle Be-ka nous annonçait, qu’il finissait son contrat d'animateur dans les clubs vacances, après six ans qu'il ait animé ces soirées avec passion. Ses spectacles avaient été vus par des personnes du showbiz, à la recherche de talents nouveaux et il avait eu des propositions. Il avait l'opportunité de monter à Paris, il avait déjà construit des spectacles, il avait son producteur et la salle. Puis Be-ka nous invita à nous avancer, autour des tables dressées et profiter du lunch. Le 1er juillet, huit heures du matin, nous prenions le minibus pour l'aéroport de Kos, direction Lyon/Saint Exupéry. Be-ka était là, à nous saluer, pour nous dire au-revoir, et bien sûr donner aux jeunes ses coordonnées email sur Instagram. Be-ka fit son spectacle à Paris avec un VIF SUCCÈS. Il commença quelques tournées, puis arrêta quelques temps. Il avait était sélectionné pour Koh Lanta La saison intitulée Koh Lanta Les 4 Terres Saison 2020. Eliminé le 23 octobre 2020, après 25 jours de survie au cours d'une épreuve d'immunité à élimination directe, Bertrand-Kamal a notamment marqué les esprits pour avoir été un candidat talentueux. Dans l'hommage rendu dans le cadre de Koh Lanta, dans une spéciale qu’il lui a consacrée Denis Brogniart a dit « C'était quelqu'un bourré de talent, il était la Bienveillance ». Sur son Site , Instagram , qui existe toujours...Be-ka avait publié. « Je suis tombé malade après l'aventure Koh Lanta, je suis en plein combat contre la maladie. »
Le 9 septembre 2020 Be-ka partit rejoindre les étoiles..Il avait trente ans, il a marqué tous les esprits de ceux qui ont eu la chance de le connaître, par son grand talent, sa gentillesse, sa combativité, sa bienveillance.
Marie